LES TROIS GRANDES LUMIERES

DE LA FRANC-MACONNERIE

Planche tracée par Robert MINGAM

 

 

Pour qu’une Loge soit régulière, celle-ci ne peut exister sans référence à une règle initiatique. Cette règle est traditionnellement symbolisée par trois outils posés sur l’Autel des Serments, (également nommé l’Autel du Travail), où ils s’imposent immédiatement à l’attention du Nouvel Initié et pressentent l’importance qu’ils ont dans notre symbolique. Ces outils sont censés révéler, à qui sait les interpréter, toute l'essence de la Franc-maçonnerie.

 

Cependant, il ne faut pas confondre les « Trois Grandes Lumières de la Franc-maçonnerie », sujet du travail qui nous occupe ce jour, avec les « Trois Lumières de la Loge », que sont le Vénérable Maître et ses deux Surveillants, ou les différents symboles recensés par trois comme les colonnettes et les symboles astronomiques figurant à l’Orient. Il s’agit bien des trois outils posés sur l’Autel des Serments qui peuvent accessoirement s’identifier aux trois principaux officiers qui dirigent les travaux de la Loge.

Livre de la Loi Sacrée

 

Le Premier d’entre eux, le Livre de la Loi Sacrée se rapporte à la Sagesse. Traditionnellement, au Rite Ecossais Ancien Accepté, il s’agit de la Bible ouverte sur le Nouveau Testament et le Prologue de Saint Jean. C’est pourquoi, à la question posée aux Sœurs et aux frères Visiteurs par le Couvreur, d’où viens tu mon Frère (ma Sœur) ceux-ci (ou celles-ci) doivent répondre « d’une Loge de Saint Jean ». Dans certaines Loges ou obédiences maçonniques interprétant la Bible comme un symbole religieux, celle-ci peut être remplacée par une règle à 24 divisions.

 

La Bible, en tant que symbole, se prête aux plus diverses interprétations. Pour les uns, elle est le livre sacré de sa foi religieuse et la révélation divine de  la  loi  morale; pour les autres, elle est l'un des plus anciens documents de l'effort humain vers la religion. Pour d’autres encore, elle représente l’humanité profane (Ancien Testament), la Révélation (le christ) l’Initiation, et la vie de l’Initié (Nouveau Testament). Elle peut encore être considérée comme le symbole des lois de l'humanité, de la dignité humaine, de l'amour. Pour chacun, elle est le symbole de la voie qui franchit le cercle étroit des préoccupations matérielles pour conduire à cette puissance supérieure  que nous  révérons sous le nom de Grand Architecte de l'Univers, tout en affirmant la liberté de conscience, de croyance et de pensée dans le respect de toutes les convictions sincères.

 

En tant que symbole, la Bible n'oblige personne à une profession de foi déterminée; l'unique obligation qui découle de sa présence est celle de rechercher la vérité, sincèrement, librement. Considérée sous cet angle, la Bible ne saurait soulever aucune objection; tout Maçon, quelle que soit sa religion ou sa conception du monde, respectera la Bible en tant que symbole ancien de la Franc-maçonnerie.

 

La Bible, dans l’instruction des divers degrés, est une des  grandes lumières. Elle est une des sources principales de l'histoire de la Franc-maçonnerie. C’est à cette source qu'une grande partie de notre rituel à été puisée (Ancien Testament). La Bible étant ouverte sur l'autel, il est loisible à chacun de l'interpréter selon ses propres convictions. En tant que symbole, elle représente le livre de la Vérité, l'expression de la Foi, le témoignage de la Volonté Divine qui a été enseigné à l'homme au cours des siècles.

 

Dans l’Ordre maçonnique Mixte International du Droit Humain, le Livre de la Loi Sacrée sur lequel s’appliquent les deux autres symboles est « la Constitution Internationale ». Bien que celle-ci ne soit pas à proprement parler une référence quant au sacré de l’Initiation, c’est sur elle que le Nouvel Initié s’engage par serment à se soumettre aux lois, règles et règlements de l’Obédience qu’il a librement choisi d’intégrer.

 

Parfois même, certaines Loges choisissent de remplacer la Bible, la règle ou le règlement par un Livre Blanc, laissant le choix à chacun de ses membres d’y trouver matière à ses propres convictions, qu’elles soient laïques ou religieuses.

 

L’Equerre

 

L'équerre est la seconde de nos grandes lumières. Du point de vue matériel, l’équerre est un objet qui, dans notre tradition, indique l’angle droit de 90° et dont se servent les architectes et les travailleurs du bois et de la pierre. L’équerre, dans son principe, est présente en tout et partout, même si elle n’est visible nulle part dans la nature car, si la nature et toute vie obéissent à la loi représentée par l’équerre, l’angle droit n’est présent que de façon fortuite dans les formes naturelles. Associant une ligne verticale et une ligne horizontale, l’équerre vient du ciel et de la terre.


Chez les bâtisseurs, l’union du niveau et du fil à plomb forme l’équerre, et on peut dire que l’équerre du Vénérable Maître se dédouble en Loge dans les attributs des deux surveillants. Les attributs des «trois qui dirigent » à travers les fonctions du Vénérable Maître et des Premier et Second Surveillants sont en rapport avec leur rôle auprès des œuvrants.

 
L’équerre du Vénérable Maître marque sa fonction de responsabilité dans la direction de la Loge. Le Vénérable Maître dirige par l’équerre, c’est-à-dire que son devoir est de rendre la Loge en conformité avec la Règle qui, n’étant pas d’essence humaine, ne saurait devenir son bijou. Elle règle nos actions selon la sévère loi de l'angle droit, c'est-à-dire de la justice, du droit et de l'humanité.

 

L’équerre du Vénérable Maître vérifie la rectitude du plan d’œuvre tout comme, dans l’imagerie médiévale la fonction de Maître d’œuvre est généralement identifiable au fait qu’il tient une règle, un compas, ou encore, le plus souvent, une équerre. Cependant les deux branches de son équerre ne sont pas égales. En qualité d’Architecte il est le garant des divines proportions symbolisées par le théorème de Pythagore.

 

Le symbole est là pour révéler la nature de l’Orient. Il fait prendre conscience de ce qu’est la vie de l’Orient: la vie, la loi de création placée à l’Orient par le Grand Architecte de l’Univers, c’est l’équerre, et ce qui est inscrit dans l’équerre, c’est le chemin de rectitude. En siégeant à l’Orient, le Vénérable Maître, porteur de l’équerre, donne le sens de la démarche initiatique, plus rigoureuse que toute forme de morale.


L'Apprenti est comparable à une pierre brute, couverte de rugosités et d'arêtes tranchantes; il  est le  produit immédiat de la nature. L'équerre lui est mise en main, afin qu'il  l'applique à sa propre personnalité et qu'il se transforme en une pierre travaillée, cubique et lisse.

 

L’entrecroisement formé à l’ouverture et à la clôture des travaux par la canne du Maître des Cérémonies et l’épée de l’Expert adopte également cette forme. Après l’ouverture des travaux, nous devons aussi nous déplacer en Loge en marquant l’équerre aux angles du pavé mosaïque.

 

Le Compas

 

Le compas, symbole de l'amour fraternel que nous devons porter à tous les êtres humains, détermine notre vie affective, notre attitude à l'égard de la fraternité maçonnique et de l'humanité. Il est, dans son essence, plus irrationnelle que l'équerre dont la loi est davantage celle de la raison. L'une des pointes du compas est solidement ancrée dans le cœur du Franc-maçon, tandis que l'autre trace le cercle immense dans lequel est inclus la totalité des hommes auxquels, que nous les connaissions ou que nous les ignorions,  s'adresse notre amour. Pareil au cercle qui est infini, notre amour du prochain, du Frère, doit être sans fin.

 

Au point vu de leur sens ésotérique, ni l'équerre ni le compas ne peuvent être considérés séparément; pris isolément, ni l'un ni l'autre ne nous rapproche de  la  perfection, car l'activité humaine procède toujours de la double source de  la raison et de l'émotion.  Mais réunies, les trois lumières constituent le point de départ de cette lumière  maçonnique  qui jaillit de l'Orient pour éclairer le monde.

 

Remarquons enfin que certaines Loges attribuent une autre signification à ces trois symboles essentiels, ce qui diminue d'ailleurs en rien la vénération  dont ils sont l'objet. Dans certaines Loges le maillet est également considéré comme grande lumière et jouit du respect qui s'attache à cette qualité; il symbolise la force, l'énergie, sans laquelle nulle œuvre ne peut être achevée.

 

Il ne faut pas confondre les 3 Grandes lumières de la Franc-maçonnerie et les 3 Grandes Lumières de la Loge.

 

Les 3 premières « Lumières de la Loge » sont les 3 officiers qui la dirige, c'est-à-dire le Vénérable Maître, le Premier Surveillant et le Second Surveillant (3 la dirigent, 5 l’éclairent, 7 la rendent juste et Parfaite).

 

Le Vénérable Maître


Il convient de préciser ici que si le Vénérable Maître est plus particulièrement chargé de parfaire la formation des Maîtres, il peut intervenir quand il le souhaite pour former les apprentis et les compagnons. Ce n’est pas parce qu’il délègue la mission de formation aux Second et Premier Surveillants qu’il doit se désintéresser du devenir des jeunes sœurs et frères. Il devra même intervenir souvent si les formateurs manquent de connaissances et d’expérience dans le domaine du symbolisme et de l’initiation.


Le bijou du Vénérable Maître est une équerre. Ce symbole est sans doute le plus présent dans le Temple maçonnique.


L’équerre est doublement présente à l’Orient, d’une part comme désignant la fonction du Vénérable Maître et, d’autre part, comme reposant sur son plateau. Elle est également présente sur l’Autel des Serments en tant que premier joyaux de la Loge.

 

Les bijoux des deux surveillants sont d’une autre nature. Ils s’adressent directement au travail de l’être qui se construit en participant à la construction du Temple.

Les Surveillants


Quel est le rôle d’un Surveillant?


Son rôle est la mission qui lui est confiée: celle concernant la formation maçonnique. Par formation, il faut plutôt entendre forme, celle qui constitue l’individu, celle qu’il a à modeler. Il ne s’agit pas de former une sœur ou un frère, il s’agit de lui communiquer ce qu’il faut pour que lui-même se forme. Donner forme à quelque chose, c’est lui donner du sens. Or, ce « sens », c’est la première chose à communiquer à la nouvelle sœur ou au nouveau frère.


Le Surveillant, vis-à-vis de ses élèves, va agir pour qu’ils se pénètrent de l’esprit de la Franc-maçonnerie, sans imposer mais en suscitant. C’est affaire de ressenti, et c’est là le rôle « d’éveilleur » du Surveillant: éveiller la sœur ou le frère à sa propre réalité, en le tenant par la main s’il le faut. Nous sommes en effet dans une pratique et non dans un exercice intellectuel. Tout l’enjeu est là, et l’ensemble des outils et des symboles qui nous accompagnent sont présents pour baliser cette voie.


Le Second Surveillant


Tout d’abord, il faut préciser que l’office du Second Surveillant est l’un des plus lourds de la Loge, car il assure l’avenir de l’Ordre tout entier. En effet, l’instruction des apprentis (prélude à l’instruction des compagnons) est cette transmission du Thésaurus maçonnique qui parvient aux jeunes Maîtres afin de leur permettre un approfondissement continu pour qu’ils puissent, à leur tour, transmettre ce qu’ils ont reçu aussi bien qu’ils le peuvent. Tout cela pour dire à quel point le Second Surveillant doit être un Maître confirmé, expérimenté, dévoué, disponible, ayant la pleine confiance de ses sœurs et frères. S’il en était autrement, les apprentis deviendraient vite de mauvais compagnons, ce qui aurait pour conséquence de perturber la Loge à plus ou moins brève échéance.


Le Premier Surveillant

 

Le Premier Surveillant s’occupe des compagnons.

 

En intervenant au début de ce chemin pour mettre la nouvelle sœur ou le nouveau frère sur la voie maçonnique, les Surveillants ont un rôle crucial et délicat. Crucial, car si ces deux premiers degrés ne sont pas compris, il faudra dix ans à la sœur ou au frère pour se remettre en selle. Délicat, car cette transmission du sens et de la perspective pour la sœur ou le frère sur son chemin de perfection demande de l’engagement. Elle demande également, de la part des Surveillants une connaissance approfondie du Rite et de ses desseins, car son travail ne se limite pas à l’enseignement d’un grade, il prépare ses élèves aux responsabilités de Maître, et aux différents degrés qu’il sera peur être appelé à franchir par la suite.


Les Trois Lumières de la Loge sont les guides des trois premiers degrés maçonniques. Elles ont pour rôle essentiel: d’assurer l’avenir d’une Loge en particulier et, par extension, de l’Ordre tout entier.

Trois autre lumières éclairent et soutiennent la Loge.

 

Il s’agit des trois colonnettes disposées en équerre, qui encadrent le pavé mosaïque. Il est dit qu'elles représentent le soleil, la  lune et le Maître de la Loge. Les flammes de la Sagesse, de la Force et de la Beauté brillent sur ces colonnes durant tout le temps des travaux, parce que sans elles rien de parfait ne peut être édifié. La Sagesse invente, la Force exécute et la Beauté orne.

 

Le Vénérable représente la colonne de la  Sagesse, le  premier surveillant, celle de la Force, et le second surveillant, celle de la Beauté. Une grande divergence existe dans les différents rites; on   parle   tantôt  de   flammes de la Sagesse, de la Force et de la Beauté, tantôt de piliers ou de colonnes.

 

Logiquement, les trois petites lumières ne sont autres chose que les trois flammes que l'ont peut aisément assimiler au soleil, à la lune et au Maître de la Loge ou, mieux  encore, au Maître et aux deux surveillants. Désigner les flammes de la Sagesse, de la Force et de la Beauté par le terme de "petites lumières" peut prêter matière à confusion et leur faire attribuer une signification secondaire. En réalité, flammes, colonnes ou petites lumières ne sont pas autre chose que de nouveaux symboles des notions fondamentales que représentent les trois grandes lumières.

 

La Sagesse

 

La Sagesse invente le plan d'une œuvre que la force exécute et à laquelle la beauté apporte l'ornement. C'est à dessein qu'il est parlé ici de sagesse et non pas de savoir, trop souvent vain et de pure forme. C'est la sagesse qui est à la base de l'inlassable recherche de la vérité et qui, utilisant les connaissances acquises au cours de cette recherche nous porte au perfectionnement de notre pensée et de notre action.

 

La sagesse, c'est la connaissance de soi qui permet au Maçon  de travailler utilement. Avant que de savoir ce que nous allons entreprendre, il importe que nous sachions ce que nous sommes et  ce dont nous sommes capables. La sagesse est la source de l'idée et de l'action maçonniques.

 

Mais à elle seule, la sagesse ne suffit point; elle doit être doublée de la force, c'est-à-dire de la volonté résolue d'agir selon la sagesse.

 

La Force

 

C'est la force qui balaiera les obstacles et triomphera des difficultés. Son premier champ d'activité, elle se trouvera dans la possession de soi,  dans la maîtrise de soi. Il ne suffit pas de connaître ses défauts et ses faiblesses, il faut tenter de les vaincre et de les éliminer. La force,  dans le sens élevé où nous l'entendons, ne se manifeste pas aveuglément; elle n'exécute que les œuvres  conformes à la loi morale; et c'est cette sagesse, marchant de pair avec la force, qui nous garantit qu'il en soit ainsi.

 

La Beauté

 

La Beauté couronnera l'œuvre commune de la sagesse et de la force en apportant à l'édifice ce qui lui manque encore; l'harmonie, l'unité, la paix, le   contentement.  La connaissance de soi, œuvre de la sagesse, la maîtrise de soi, œuvre de la force, trouvent leur achèvement dans le perfectionnement de soi, œuvre de la beauté. Car la beauté réside dans la perfection et dans les efforts qui tendent à celle-ci. La tolérance, la patience, la clémence, la bienveillance, l'amour du Frère et du prochain sont à nos yeux des expressions manifestes de la beauté. Sans le triple concours de la sagesse, de la force et de la beauté, rien de parfait ne peut être créé.

 

Ces trois petites lumières brillent du haut des colonnes sur lesquelles  repose la Loge, ou du moins sont en connexion étroite avec elles; de telle sorte que nous pouvons fort bien parler des colonnes de la Sagesse, de la Force et de la Beauté. Mais, par le jeu d'une autre connexion, ces colonnes portant la Loge sont également le Maître et les deux surveillants. En effet, le Vénérable gouverne  et dirige l'Atelier selon sa sagesse; le premier surveillant est chargé de surveiller le travail, de maintenir la discipline et  l'ordre et de payer les ouvriers; le second surveillant enfin a pour mission de surveiller les Frères en dehors des heures de travail et d'assurer le maintien de l'harmonie, de la paix et de la concorde. Il est donc parfaitement justifié de dire  que la Loge repose sur ces trois piliers, car en fait ses trois premiers officiers portent presque tout le fardeau des responsabilités. C'est pourquoi il est du devoir des autres officiers et, d'une manière générale, de tous les Frères de leur faciliter la tâche et de les soutenir par une collaboration fidèle et une observation stricte de leurs obligations.